Le premier de nous deux qui rira / Orestes (tw violence)

Il y a une espèce d'ombre que je hais par dessus-tout – ce sont celles qui glissent derrière vous sans qu'on y pense jamais, comme on ne pense jamais aux moucherons fulgurants que l'on écrase entre ses doigts lors des soirées d'été trop moites.

Même pour une ombre, Orestes est bien trop pâle – c'est un rien si prétentieusement superflu qu'il est en vérité bien difficile à détester sans vanité – c'est bien cela que je déteste chez lui. Oui, je déteste Orestes, mais sans passion aucune ; et je l'aurais ratatiné entre mes paumes – si je ne savais pas que l'on ne se débarrasse jamais tout-à-fait réellement de l'inconsistance pure. La grisaille échappe toujours, bien sûr – il faut l'expier en usant de moyens très directement matériels. Je dirais que le vide a le naturel en sainte horreur.

« Orestes » il n'est pas plus grand que moi – j'ai plaisir à lui rappeler qu'il m'arrive à la cheville « il y a quelqu'un qui veut te parler dans la salle de classe » tu n'es pas dupe, n'est-ce pas, mon ange de pacotille ? Entre nous je n'ai pas tellement besoin de faire semblant – et si je pose ma main sur ton épaule sans relief, c'est surtout pour que tu en ressentes l'irrévocable embarras ; je n'ai ce genre de caresses que pour toi, car j'aime plutôt bien ces façons que tu as de t'y couler, minable comme la brume. Ton inconsistance – me fait plaisir, et j'ai bien assez peu de plaisirs dans la vie pour encore les fuir.

Et tu te pousseras tout seul, sans doute, dans l'antichambre ordinaire – je ne commande qu'à ta répulsion ; c'est pour cela que j'ai tout intérêt à ce que tu me répugnes. Voilà ; nous y sommes, « on s’assoit ? » qui a besoin de trône, quand on a les brancards ? Autant se mettre confortablement à table – « en polonais Orestes, tu te souviens » puisqu'on ne peut pas couper toutes les paires d'oreilles qui poussent vivaces comme de la pure moisissure dans les crevasses de nos quatre murs.

« Orestes » j'aime répéter ton prénom, Orestes, ce n'est pas que je le trouve particulièrement beau, ni particulièrement laid, ni particulièrement important – j'apprécie simplement les rituels de possession « nous n'avons pas discuté depuis longtemps, et tu sais que j'ai besoin de tes nouvelles » aucune précaution n'est utile, puisque je ne crains pas d'abîmer tes futilités « tu dois me dire tout ce que j'ai raté » nous n'avons pas le temps de revoir les règles, ce sont toujours les mêmes « Commençons par ce sur quoi vous travaillez en ce moment au club de journalisme. »

Tu sais que je ne souris pas par amusement – je ne m'amuse pas de ma continuité, j'ai beaucoup de sérieux – c'est un rappel que l'on ne peut déployer que du bout des lèvres, tout de crocs déchiqueté ; nous n'avons pas le temps, Orestes, chaque seconde qui s'écoule est une seconde de moins devant l’Éternel. Dépêchons-nous.



(hrp : désolée je poste sans code pour le moment sans aucun respect,,,,,,,)